Pénurie de personnel qualifié : le cercle vicieux

30.06.2023

Bien que la Suisse ait gagné 1,3 million d’habitants entre 2003 et 2020, et que le nombre de frontaliers ait doublé, le nombre de postes vacants, lui, a quadruplé. Il s’agit tout simplement d’un effet boule de neige et d’une spirale sans fin. Le nouveau médecin (un spécialiste qualifié venu de l’étranger) avec deux enfants a besoin d’un ou d’une enseignant-e, qui a son tour aura besoin d’un boulanger, qui a son tour aura besoin d’un chauffeur de camion et d’un maçon, qu’à nouveau nous n’aurons pas sur place et qui sera recruté à l’étranger. Le maçon s’installe ici avec deux enfants. Cet autre vient à son tour avec deux enfants, et tout recommence – comme un escalier à vis sans fin. Cette croissance quantitative ne peut pas se poursuivre indéfiniment. Nous devons tabler sur une croissance économique (par habitant) qui soit qualitative, plutôt que quantitative. Si vous voulez vraiment lutter contre la pénurie de main-d’œuvre qualifiée, signez l’initiative pour la durabilité[1].

Source : Statistiques annuelles sur l’immigration selon les motifs pour 2022, https://www.sem.admin.ch/dam/sem/de/data/publiservice/statistik/auslaenderstatistik/monitor/2022/statistik-zuwanderung-2022-jahr.pdf, p. 11.

Pour ce qui concerne les motifs d’immigration de l’an dernier, les immigrés en provenance de l’UE sont principalement venus pour exercer une activité professionnelle. Parmi les immigrés en provenance de pays tiers, qui, en Suisse, représentaient 608°000 personnes en 2022, 59% étaient en cours d’emploi ou d’apprentissage[2]. Les ressortissants de l’UE représentaient 94% des personnes arrivées en Suisse en 2022 pour y travailler, les 6% restants étant originaires de pays tiers.

Ce qu’il faut, en fait, et impérativement, c’est recruter des immigrés qui apportent une valeur ajoutée à notre pays. C’est-à-dire des immigrés qui paient plus ou au moins autant de taxes en Suisse qu’ils utilisent de prestations étatiques. Malheureusement, plus un immigré est peu qualifié, plus il est sédentaire[3]. Ce sont donc surtout les travailleurs peu qualifiés qui restent dans notre pays et profitent de notre État social bien développé. Les professionnels hautement qualifiés, en revanche, ont tendance à quitter la Suisse pour pouvoir profiter d’opportunités d’évolution professionnelle.

Une croissance démographique de masse, de surcroît non contrôlée, est par conséquent néfaste pour notre marché du travail, pour notre État social, pour notre environnement et pour la société de manière générale[4]. Celles et ceux qui la refusent soutiennent l’initiative pour la durabilité !

Une étude de l’Office zurichois de l’économie et du travail[5] montre qu’entre 2007 et 2014, parmi les travailleurs immigrés en Suisse, moins d’un sur cinq (19,8%) travaillait en moyenne dans une profession où existe une pénurie de main-d’œuvre qualifiée ; au Tessin (15,1%) et à Genève (14,6%), c’est même seulement un immigré sur sept. Les statistiques sont encore plus éloquentes en ce qui concerne les frontaliers : seuls 16,6% d’entre eux contribuent à réduire la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Au Tessin, ils ne sont même pas un sur huit.

[1] Source : Adecco Group, Swiss Job Market Index (resp. mars), corrigé des variations saisonnières.
[2] Selon «Statut d’activité de la population résidante permanente», OFS.
[3] «Was kostet die Zuwanderung?», George Sheldon in Politik & Wirtschaft, Schweizer Monat Nr. 1049, September 2017, p. 15.
[4] Reiner Eichenberger: Zuwanderung: Bitte mal nachrechnen, in: Handelszeitung, 4.7.2020, https://www.handelszeitung.ch/politik/zuwanderung-bitte-mal-nachrechnen-304058